Mercredi 29 mars, moment d’échange avec Camille Ortie, plasticienne, et Manon Dumont, technicienne son
Mercredi 29 mars, 15h, temps de chien à Lilia – pluie et tempête de sable. Trois braves adhérent.e.s ont traversé l’estran sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit, seuls, inconnus, le dos courbé :), pour y rencontrer Camille Ortie, plasticienne, et Manon Dumont, technicienne son.
Hélène nous a transmis son résumé de ce moment :
Elles nous avaient prévenus qu’elles le feraient ….dès leur demande de résidence sur l’île dans la maison-phare … mais va donc comprendre d’avance : faire entendre et voir l’invisible qui gigote et file et remonte et se heurte et et et …l’invisible …là dans cette mer qui monte et qui descend …. le plancton .
Le temps était propice, harmonieusement calé sur la bande son qu’avait recueillie Manon, le vent du Sud avait transporté sable et eau dans nos yeux, nous arrivions bien imbibés … Manon nous a fait écouter un premier montage sonore via deux postes de radio FM dans la cuisine chaleureuse, au mur les vues des tours et détours de leur séjour dans l’atmosphère ensoleillée et grandeur nature de l’île au feutre, à l’aquarelle …
et puis et puis …. Camille nous a quand même un peu prévenus en disant que finalement elle avait fait une installation … Elle a ouvert la porte de la cuisine, nous avons traversé la petite pièce et …
Camille avait laissé toute la mer autour de l’île s’engouffrer dans la salle principale de la maison-phare …une multitude de longues algues infiniment fines flottaient dans cette eau un peu glauque. Par terre sur le lino, le petit phare reposant, voyant les vagues des profondeurs mollir jusqu’à lui et on entendait le plancton et plein d’autres êtres, des bruits de mouvements, de légers chocs, de déplacements, de soupirs ?? pas sûr mais ça ressemblait. Sur le mur aveugle, grossies un million de fois, les formes reconnaissables des bestioles …. tout le plancton nous immergeait et circulait …. nous avions pris la pluie et le vent sur l’estran en venant et là nous prenions l’invisible plancton dans ce bocal, en vacillant sur notre propre taille : j’aurais facilement trouvé normal qu’un éléphant de mer plus grand que le phare et tant d’autres êtres encore entrent dans le bocal …
C’est la transformation de la maison-phare la plus marquante pour moi : elle entre dans les inoubliables; ce sont les dimensions qui ont été revues, cette projection dans l’infiniment petit et l’élément liquide des sous-sols de la mer qui a pris possession définitivement de l’intérieur .
Nous n’avons pas été étonnés en revenant jusqu’à la voiture d’Eliz et Gérard, d’être rincés, trempés et d’aimer l’être, d’une certaine façon … Hélène.
Bande son « Signature du phare de l’île Wrac’h »
Bande son « Le bal des abysses »